Françoise Hardy  -  Magazine Covers
Paris Match N° 3750  
France : Paris Match N° 3750  17th march 2021
Paris Match consacre cette semaine sa couverture à la chanteuse Françoise Hardy à l'occasion de la publication du recueil  « Chansons sur toi et nous ». Extraits d'une interview confession.

Cette passion en clair-obscur, elle l’a racontée à demi-mot dans un répertoire aux airs d’exutoire. Aujourd’hui, l’icône de la chanson française donne les clés des paroles qu’elle a écrites
pour elle et pour d’autres. « Chansons sur toi et nous », un recueil qui compile tous ses textes depuis 1962, est ponctué de ses souvenirs. Pour nous, elle revient sur son combat contre la
maladie et pour l’amour, plus fort que les épreuves.

Paris Match. Quand ce projet de recueil de vos chansons est apparu, vous avez refusé: “Mes premiers textes sont trop mauvais.” Vous ne vous étiez jamais replongée dans ce moment de
votre carrière? Françoise Hardy. Non. En dehors de “Tous les garçons et les filles”, mes premières chansons inventaient des situations sans rapport avec ma vie, où il ne se passait rien.
Je ne les réécoute jamais. La guitare offerte par vos parents à l’obtention de votre bac a déterminé votre vie.

Etait-ce osé, pour une jeune fille, de réclamer une guitare?
C’était très irrationnel. Jouer de la guitare, écrire des chansons et chanter ne m’avait pas effleuré l’esprit. J’imagine que ce choix m’a été dicté par un ange gardien bienveillant. D’autant
que j’avais été élevée en partie par une grand-mère qui n’avait pas cessé de me rabaisser. Je me trouvais laide et me voyais devenir nonne. Ma mère espérait pour moi un grand avenir en
m’inscrivant à Sciences po, sans me demander mon avis, et j’avais tout de suite eu conscience de ne pas être à la hauteur de ces étudiants élégants et brillants. Cette impression d’être une
sorte de fausse note parmi les autres m’a accompagnée toute ma vie.

(...)

Savoir aimer est très difficile.
En 1977, dix ans après votre rencontre avec Jacques Dutronc, vous écrivez “Chanson sur toi et nous”: “J’aimerai autant ta vieillesse que j’ai aimé ta jeunesse.” Ça ne s’est pas passé ainsi, non?
Mais si! Il y a eu une longue parenthèse où Jacques a préféré rompre avec moi, après que je lui ai appris que mon cœur avait battu pour quelqu’un d’autre. Mais quand, en 2015, tout le monde
a cru que je mourais, on m’a rapporté que ça l’avait bouleversé au point de dire à la personne qui vivait avec lui que j’étais la femme de sa vie. Cela m’a profondément émue. Après Les
Vieilles Canailles, il a cessé radicalement de boire la moindre goutte d’alcool et il a eu plus de facilité à me faire comprendre qu’il avait toujours des sentiments profonds pour moi.
C’était réciproque. Il est l’homme de ma vie et nous avons vécu ensemble nos plus belles années. Nous nous écrivons chaque jour et c’est merveilleux de nous envoyer, après plus de
cinquante ans de relation, autant de signes d’attachement, de tendresse, d’inquiétude pour nos états de santé respectifs. L’amour consiste à s’efforcer de comprendre l’autre, à se comporter
avec lui de façon digne et compréhensive, à accepter sa différence. Savoir aimer est très difficile. Une vie n’y suffit pas

(...)

Vous aviez peur de mourir?

Non. En 2015, je n’ai pas eu conscience de ce qui m’arrivait car j’ai été pas mal dans le coma. Aujourd’hui, c’est pire, bien plus concret. Privée de salive depuis trois ans par 45 séances de
radiothérapie, j’ai en permanence des détresses respiratoires, des crises d’étouffement et de suffocation, sans parler des hémorragies nasales interminables. Je n’ai pas peur de mourir mais
j’ai très, très peur de souffrir, d’autant plus que c’est déjà le cas, peur aussi de la souffrance de devoir me séparer des deux êtres que j’aime le plus au monde, Thomas et son père. Quand
mon état deviendra encore plus insupportable, je n’aurai, hélas, pas le soulagement de savoir que je peux me faire euthanasier. La France est inhumaine sur ce plan-là.

Retrouvez l'intégralité de notre interview exclusive avec Françoise Hardy dans le numéro 3750 de Paris M