Grâce au “Fraternité Matin” on est plutôt bien informé sur le passage
très attendu de Françoise Hardy à Abidjan ( capitale de la Côte d’Ivoire
jusqu’en 1983 ). Le journal lance une série d’articles sur Françoise et
Jean-Jacques en attendant leur arrivée.
Abidjan : Le 22 avril Françoise chante à l’hôtel Ivoire pour l’Amicale des Corses et le 24 avril au cinéma Le Paris.
Fraternité Matin
25 avril 1967 (Côte d’Ivoire)
Le 26 avril Françoise se produit à Libreville ( capitale du Gabon) pour une soirée organisée par le Rotary Club.
Bulletin quotidien de l’Agence Gabonaise de Presse - 28 avril 1967

Françoise Hardy et Jean-Jacques Debout ont assuré avec talent le
succès de la soirée du Rotary Club .C'est à un très bon spectacle
"son et lumière" qu'a été convié le public qui a envahi mercredi
dans la soirée la salle des fêtes de l'Hotel de Ville où se produisaient
2 vedettes françaises : Françoise Hardy et Jean-Jacques Debout.
Les 2 vedettes ont à tour de rôle fait leur entrée sur la scène sous une
salve d'applaudissements tandis qu'un frisson d'enthousiasme
parcourait toute la salle (...) FH quant à elle a fait sensation
lorsqu'elle est entrée sur scène en veste et pantalon blancs, pâle et
mince silhouette sous l'auréole de cheveux blonds.
Sous les encouragements du public, dans un style encore "yéyé",
FH a commencé son répertoire sur des rythmes déchaînés et puis
guitares et choeurs ont diminué d'intensité pour laisser percer la
candeur vocale qui est la sienne dans des chansons sentimentales.
La petite Françoise a su plaire au public gabonais par des
chansons exprimant parfois le désespoir, la solitude et l'espérance,
des chansons lentes parfois saccadées.
Sans aucun doute FH s'est révélée au public gabonais comme une
vedette française de la chanson des plus prisées pour avoir su tracer
son chemin de longue main. Tous ceux qui l'ont vue sur scène
n'ont pas ménagé leurs applaudissements à ce jeune talent qui a
interprété sa 1ère chanson à succès "Tous les garçons et les filles"
mais aussi avec émotion "Il n'y a pas d'amour heureux". L'on
remarquait plusieurs membres du gouvernement et du corps
diplomatique ainsi que de très nombreuses personnalités
librevilloises.
Le lendemain, 27 avril, le cinéma Le Capitole à Yaoundé ( capitale du Cameroun) accueillera Françoise.
La semaine camerounaise - Edition du 5 mai 1967

Françoise Hardy et Jean-Jacques Debout à Yaoundé pour le Rotary Club

Le Rotary Club de Yaoundé a gagné son pari. Alors que les augures avaient pu manifester des réserves, le gala
annuel qu'il a organisé au profit de ses œuvres sociales aura connu un succès sans précédent.
Ceci se passe le 27 avril 1967 dans la grande et très belle salle du cinéma "Le Capitole". Depuis son inauguration,
ce cinéma qui est aussi devenu le plus beau théâtre de la capitale a déjà abrité tous les genres.
Et pourtant ce soir on a le sentiment qu'un record est en train d'être battu, qu'un événement se vit.
Plus de 2000 personnes sont là. Celles qui comme d'habitude ne se soucient pas de s'entourer de toutes les
précautions nécessaires restent debout durant toute la soirée. Dans cette atmosphère surexcitée où des milliers
d'yeux se braquent avec une certaine voracité sur la scène encore vide, Me Robert Cazenave, Pdt du Rortary Club de
Yaoundé rappelle brièvement ce qu'est le Rotary (...) Dès la première chanson, dès les premières mesures on sait
que JJD est accepté. Il a conquis Yaoundé (...) Tout le monde reprendra en cœur, à sa demande le célèbre "Alleluia".
Il sera rappelé plusieurs fois à l'issue de son tour de chant. Puis c'est l'apparition; Françoise Hardy dans sa tenue
blanche, belle et blonde, arrive et on sait d'emblée qu'elle ne fera aucune concession au public. Le silence se fait
dans la salle impressionnant. Le tout Yaoundé est venu l'entendre. Elle le sait. Elle le salue. Mais le charme est
rompu par quelques galopins qui du fond de la salle font de l'esprit d'un goût douteux. Françoise sans se démonter
entame son tour de chant et pendant 3/4 d'heures impose son rythme.
Ne laissant même pas les applaudissements s'épuiser elle nous confie coup sur coup son "mini message".
Trois thèmes principaux : le drame de la rupture, la solitude, la jeunesse. On aime ou on n'aime pas ce genre de
chansons. Mais ce qui est certain, personne n'est resté insensible au charme et au style personnel de la grande
Françoise Hardy. Ce qu'elle a dans le cœur, elle l'offre sans détour avec simplicité. Une certaine froideur entoure
peut-être son attitude, un certain détachement déconcerte peut-être son public, mais elle a le culte de l'amitié et
elle n'hésite pas à dédier sa chanson "L'amitié" au public de la capitale. Ainsi quoique l'on puisse penser, quoique
l'on puisse entendre ou voir écrire, il n'en reste pas moins que l'on a assisté à un excellent spectacle de classe
international.
Françoise se rappelle que Jean-Jacques avait mis une
énorme fausse araignée au milieu du large et long couloir
qui menait à leurs chambres . Les choristes et Françoise
avaient cru qu’elle était vraie et avaient donc poussé de
grands cris. Jean-Jacques Debout ne cessait de faire des
plaisanteries et devenait faitigant finalement.
Jean-Jacques dans son autobiographie “Ma vie à dormir
debout ” se rappelle que Françoise était malheureuse
lors de cette tournée . Elle lui aurait confié qu’elle
arrêterait la scène.

“Quand j’ai voulu bavarder avec Françoise, je me suis aperçu que
ses yeux étaient pleins de larmes et qu’elle détournait son joli visage
pour me cacher sa peine. J’ai pensé que le tour de chant l’avait
inquiétée. Elle venait pourtant d’être acclamée et d’émouvoir par
sa beauté, sa voix et sa présence si rares, toute une jeunesse qui
n’avait des yeux pour elle. Je lui ai parlé de tout ce que j’avais
ressenti durant son concert : l’intelligence de ses chansons, son
élégance naturelle, tout ce qui, une fois de plus, avait conquis son
public.
Françoise est d’un caractère très vrai. Et, très simplement, comme
elle seule pouvait le dire, elle m’a confié qu’elle souffrait de ce que
Jacques lui manquait terriblement. Ces grands voyages les
séparaient d’une façon trop cruelle. Elle ne supposait pas de penser
que le lendemain, elle devait chanter à Abidjan, puis à Libreville,
puis à Kinshasa, puis à Douala, Cotonou, Yaoundé ... En pensée,
elle appréhendait tous ces bagages à défaire et refaire , ces chambres
d’hôtel tropicales au cœur de nuits de solitude, ces environnement
qui lui était étranger. Elle a ajouté que la scène n’était pas quelque
chose de bénéfique pour elle, mais plutôt une expérience qui, loin
de l’aider à se construire, la démolissait. C’était cela qui faisait
peur à Françoise, si fragile et si forte à la fois.
M.A.T. N°  01/05/67   Les périls de Françoise
Après quelques semaines (?), qui ont été très difficiles pour elle et
très plaisantes pour moi, la tournée est arrivée à sa fin. Nous avons
décollé de Ouagadougou pour Orly. Dans l’avion, j’ai offert à
Françoise un stylo plume Waterman en argent en souvenir de ces
milliers de kilomètres parcourus ensemble à travers toute l’Afrique.
Paris se rapprochait. C’est alors que Françoise m’a annoncé sa
décision: “Tu es le dernier ami à m’avoir vue chanter en scène.
J’ai choisi d’arrêter. Je continuerai à écrire des chansons et à les
enregistrer, je les chanterai peut-être à la télévision, mais on ne
me verra plus sur scène.”. J’étais absourdi. Je pensais sincèrement
qu’elle reviendrait un jour sur cette décision injuste car je ne l’avais
jamais vue aussi radieuse et aussi belle que pendant cette dernière
tournée. Mais elle avait bien mûri ce choix.
JDF 20/05/67  Françoise interviewée par Yves Salgues
le 4 mai 1967 ( jeudi de l’Ascension) dans sa chambre
à l’hôtel Amigo à Bruxelles.
Précisons que la tournée n’a pas duré des semaines et que Françoise a arrêté la scène juin 1968 et pas fin avril 1967.

Deux autres anecdotes que Françoise m’a envoyées par e-mail. Je connaissais celle de la piscine mais pas l’autre.

C’est à Libreville qu’après le “spectacle”, mes musiciens sont sortis vadrouiller comme chaque soir et je suis donc
rentrée dans ma chambre. Il devait y avoir la pleine lune car cela éclairait mon dessus de lit que j’ai d’abord cru
brodé avec de petits triangles ou losanges brillants qui brillaient sous la lune. Mais je me suis vite aperçue que
cela grouillait horriblement : il y avait des dizaines de cancrelats (c’est ce qu’on m’a dit que c’était mais je n’en
suis pas sûre) sur mon lit. Dans ce genre de situation je touche le fond de la détresse (ma phobie des insectes
m’aura empoisonnée tout au long de ma vie). Et comme il n’y avait personne dans l’hôtel, j’ai passé la nuit dans
un fauteuil aussi éloigné que possible du lit.
2ème anecdote, à Douala . L’avion affrété pour nous et où tous nos
bagages se trouvaient  déjà a eu un problème technique et nous avons
dû retourner à l’hôtel. Il faisait une telle chaleur, que finalement les
musiciens et moi nous sommes baignés tout habillés dans la piscine
de l’hôtel  - j’avais la petite robe rouge que vous voyez sur la photo.
(Abidjan : Françoise en pirogue). Ces hôtels en Afrique noire étaient
sinon affreux, du moins très“cheap"
Du 20 au 27 avril 1967 Françoise effectue cette tournée en Afrique noire avec Jean-Jacques Debout en vedette
américaine. A part le magazine “Moins 20” la presse en France n’a rien écrit à ce sujet. La tournée fait escale
dans les capitales du Sénégal , de la Côte d’Ivoire, du Gabon et du Cameroun.
Notre Françoise, douée d’une honnête décapante, trouve tout
de même le temps de déclarer qu’elle n’était pas emballée par
la chanson “Hablemos del amor” avec laquelle le chanteur
espagnol Rafael avait défendu les couleurs de l’Espagne au
Concours de l’Eurovision.
En route pour Dakar l’avion faisait escale à Las Palmas. Françoise Hardy, vêtue de son manteau Courrèges couleur
turquoise sur une minijupe, n’était pas d’humeur à subir une interview.
La tournée en Afrique du Nord ( 20 - 27 avril 1967)
Moins 20 N° 20 01/07/67
Heureusement les journaux locaux nous permettent de retracer fidèlement cette tournée. Françoise et Jean-Jacques
arrivent le 20 avril à Dakar, capitale du Sénégal. Ils donnent 2 galas au Théâtre National de Sarono, le 20 et 21 avril.
Le 22 avril elle quitte Dakar direction Abidjan.
A quelques jours du départ le batteur Serge Biondi
est viré pour incompatibilité d’humeur et remplacé
par Charles Benarroch. ( “Un long chant d’amour”
par F. Quinonero p.159).